Apprentis à vie : La galère silencieuse - L'Œil des jeunes

L'environnement économique difficile dans lequel nous vivons oblige beaucoup de gens, particulièrement les jeunes à se contenter de petits boulots pour pouvoir s'assurer un minimum vital. Ainsi, nombre d'entre eux se retrouvent apprentis qui dans un atelier de soudure, qui dans un garage ou tout simplement dans un taxi-brousse avec toujours le vœu secret de devenir un jour son "propre patron". Mais beaucoup tombent dans des pièges au risque de demeurer d'éternel apprentis.

En général, l’apprenti est lié à son maître par un contrat d’apprentissage. D’après le code du travail burkinabé (loi 11/92/ADP du 22 Décembre 1992) en son article 42 “le contrat d’apprentissage est celui par lequel une personne, appelée maître s’oblige à donner ou à faire donner une formation professionnelle méthodique et complète à une personne appelée apprenti et par lequel celui-ci s’oblige en retour à se confronter aux instructions qu’il recevra et à exécuter les ouvrages qui lui seront confiés en vue de son apprentissage.
Le contrat doit être constaté par écrit, sous peine de nullité. Il est rédigé en langue officielle et si possible dans la langue de l’apprenti.
Le contrat est exempt de tous droits de timbre et d’enregistrement”.
De cette disposition, on peut retenir essentiellement trois aspects :

  • l’obligation pour le maître d’assurer à l’apprenti une formation professionnelle méthodique et complète dans le métier prévu,
  • l’obligation pour l’apprenti de se soumettre aux instructions du maître en vue de l’apprentissage,
  • la nécessité d’une preuve écrite de l’existence du contrat.

Corvées et tâches subalternes : les maîtres qui empêchent d’apprendre

Dire que le maître doit enseigner son métier à l’apprenti est chose très aisée. Mais la réalité est tout autre. En effet, ce qu’on constate généralement, c’est que les apprentis sont presque toujours confinés à des tâches secondaires dont l’exécution ne développe pas en eux les véritables aptitudes que le métier requiert. Ils sont ainsi limités à des tâches exclusivement subalternes incapables de stimuler leur créativité. De véritables bêtes de Somme destinées à remplir les corvées redoutées par le maître. Pis, certains maîtres développent toutes sortes de stratégie, pour que les apprentis ne soient jamais à leur niveau. Ainsi, il arrive que des maîtres- tailleurs par exemple, au moment de la coupe d’un modèle envoient leurs apprentis payer du tissu à l’autre bout de la ville. A leur retour, le modèle est déjà en forme, et eux n’ont plus qu’à planter l’aiguille de la machine sur les bords du tissu. On comprend alors pourquoi, après plusieurs années d’apprentissage, certains d’entre eux ne savent pas mieux que rafistoler un vieux pantalon. En d’autres termes, dans un contexte ou l’apprenti est toujours limité à des tâches périphériques et n’a aucune chance d’apprendre réellement, son employeur devient plus un bourreau qu’un maître.

Des apprentis sans volonté́ d’apprendre

Si l’on est prompt à jeter l’anathème sur les maîtres quand les apprentis n’apprennent rien, il y a que ses derniers ne sont pas au-dessus de tout soupçon. En effet, un apprenti doit toujours se mettre dans une attitude qui favorise l’apprentissage.
Ainsi, des qualités comme la modestie, l’honnêteté et l’application sont requises. Or certains apprentis brillent par leurs coups-bas et multiples “deals” réalisés sur le dos du maître. De tels comportements créent à la longue un climat de méfiance entre apprentis et maîtres et aboutissent très souvent à des divorces douloureux, c’est-à-dire, des ruptures de contrats.

Apprentis”entre nous”.

L’absence de contrat d’apprentissage dûment écrit est presque une constante dans notre pays. En général, les choses se passent d’une manière très informelle (“entre nous”). Le jeune se promène d’atelier en atelier et tombe au hasard sur un patron qui vient de renvoyer son apprenti. Après quelques minutes de discussion, le marché est conclu et dès le lendemain, notre jeune devient apprenti. Ou bien, les choses se passent par le biais d’un parent ou d’une connaissance qui négocie avec le patron et réussit à placer “son gars”. Dans ce cas de contrat de “gré à gré”, l’apprenti n’a rien à réclamer en cas de rupture de contrat. Ainsi, les cas sont nombreux où des apprentis sont renvoyés avec des arriérés de salaires et sans secours possibles, sinon le parent ou l’ami qui avait négocié le contrat. Mais, il reste que le sort de tel apprenti est entièrement entre les mains du patron. Dès lors, l’arbitraire devient possible à tout moment.
Etre apprenti, ce n’est pas une fatalité. C’est même quelque fois un passage indispensable dans la formation professionnelle. Mais, l’apprenti tout comme le maître doit s’investir pour que cette expérience ne soit pas vécue comme un calvaire mais plutôt une étape d’initiative et d’enrichissement véritable.

Armand Joseph

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